Elektra à l’Opéra de Montréal – Strauss dissonant et électrisant

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L’opéra mythique de Richard Strauss, Elektra, a pris l’affiche le samedi 21 novembre à la Salle Wilfrid-Pelletier.

En me rendant à la représentation, je ne pensais pas en sortir aussi satisfaite. Cette pièce est reconnue pour sa richesse, sa complexité et son enivrante musique. Mais c’est l’équilibre entre les longues itérations sentimentales connues de l’opéra et la succession rapide des événements, qui en font une excellente introduction pour tous les néophytes de cet art. Ayant grandie sous les lumières des « blockbusters » américains, l’opéra faisait partie des domaines artistiques alimentant mes fantasmes romantiques d’une époque idéalisée. Le chef-d’œuvre de Strauss a assurément su transcender les frontières du temps et de genre, et rappelle la grandeur de l’opéra en 1h44 de plaisir et d’élévation, et ce malgré, une réalisation questionnable.

Nous sommes ici en pleine mythologie grecque. Enragée par l’assassinat de son père Agamemnon par sa mère Clytmnestre, Électre est exclue du noyau familial et vit dans un atelier au sous-sol de la maison, lieu de la mise en scène. Ces tourments sont une source de terreur pour la famille : elle est le miroir de leur passé. C’est à travers ses questions que se dévoileront les secrets de famille qui conduiront à la vengeance. Sans étonnement, j’ai appris plus tard qu’Électre signifie lumière en grec.

D’ailleurs, la scène est occupée en grande partie par une statue d’Agamemnon, éclairée de diverses façons et qu’on fait pivoter; au fur et à mesure que les révélations entourant son meurtre sont dévoilées, le visage de la statue se révèle également. Nous ne sommes pas très loin ici de l’allégorie de la caverne. Une analogie peut-être un peu trop grossière pour la qualité cet opéra à la production décevante.

Le manque d’unicité entre les éléments de la mise en scène est déroutant. Par exemple, les costumes sont profondément dissonants : Électre, joué par Lise Lindstrom, est habillé en salopette lui donnant des airs de Gavroche. Sa mère, jouée par Agnes Zwierko, se pavane en robe du XIXe siècle et est suivie de servantes qu’on jurerait être des secrétaires travaillant pour le KGB.

Idem pour le jeu des acteurs. Censée être tourmentée, colérique et dangereuse, Lise Lindstrom ne rend pas hommage à son personnage. Électre ressemble davantage à une enfant têtue qui ne contrôle pas ses sautes d’humeur. Une interprétation qui manque de profondeur.

Heureusement pour nous, la production musicale a été donnée à Yannick Nézet-Séguin, chef de l’Orchestre Symphonique de Montréal et élu musicien de l’année par la revue Musical America. Son dynamisme et la qualité de ses musiciens nous prennent d’assaut et nous fait entrer dans le monde merveilleux de la tragédie.

Avec une trame narrative active et prenante, soutenue par une musique flamboyante, le génie Strauss continue de nous émouvoir. Je suis sortie de la pièce avec une énergie d’enfer et avec la volonté de surmonter toutes les embûches que je trouverai sur mon passage. Strauss serait-il à l’origine du héros hollywoodien?

Elektra à l’Opéra de Montréal

Salle Wilfrid-Pelletier, Place des Arts.

Jusqu’au 28 novembre 2015

Article : Cécile Branco-Côté

Photos : Boris Perraud

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Boris Perraud

Photographe depuis le début pour Querelles, je trimballe toujours ma caméra pour tâter le pouls de notre ville. Après des études en arts visuels et en photographie, je travaille aujourd'hui sur plusieurs projets qui me permettent de découvrir sans cesse de nouveaux visages. SAY CHEESE! Suivez-moi sur Instagram @Querelleur

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