Par Catherine Martel 24 juin 2015 dans Bouffe, Restaurant, Voyage

Escapade au Mont-Tremblant – Éric Gonzalez revampe le menu du Casino de Tremblant

Tremblant interpelle pour son plein air vif, ses flancs de montagne somptueux, et son village vibrant. Un peu moins connu pour sa gourmandise, le Mont-Tremblant peut désormais se targuer d’accueillir une nouvelle table fraîche, raffinée et surprenante à son Casino. Querelles s’est aventuré au cœur des Laurentides pour savourer le tout nouveau menu du restaurant Altitude conçu par le chef Éric Gonzalez et qui promet de battre de nouveaux sentiers culinaires. Prêt pour une ballade?

Jouer dans les bois

Niché légèrement en retrait des pistes et du brouhaha touristique, le Casino de Mont-Tremblant invite les fans du hasard dans un cadre intime – c’est l’un des plus petits établissements du genre au Québec, et surtout lumineux, où l’on se plaît à apercevoir des Bambi poindre leur museau près d’une fenêtre, juste au-dessus d’une table de poker. Depuis décembre, ce qui singularise le Casino pour en faire une destination de choix pour les épicuriens baladeurs, c’est l’arrivée du chef Éric Gonzalez (anciennement à l’Auberge Saint-Gabriel puis aux Enfants Terribles) à la tête du restaurant Arôme Altitude, un lounge de grillade et de fruits de mer. Mais Gonzalez ne saurait se satisfaire d’une carte convenue : un parcours tout autre attend les papilles avisées des invités du Casino…

Sous l’emprise du chef – dégustation gourmande à l’aveugle

S’est déclinée sous la supervision de Gonzalez une expérience exclusive et spontanée : le menu Table du Chef est un véritable canevas où l’équipe lasse libre court à ses fantaisies gastronomiques. Ce repas cinq services systématiquement adaptés aux arrivages du moment et à l’humeur des cuisines est servi dans une salle panoramique privée pouvant accueillir de 6 à 8 personnes.

Avant de passer à table, une visite du Casino s’imposait. Samedi soir est soir de fête au Casino de Tremblant, puisque les beaux Jacks, hôtes masculins craquants tout de tuxedo vêtus, accueillent les dames du lady’s night pour le mois du Black Jack (qui se déroule aussi à Montréal les jeudis). Une fois les bases du jeu maîtrisées, on passe de la table des mises à la table du chef où Gonzalez nous a concocté son menu du jour sur mesure inspiré de l’été en altitude, des légumes de saison et du charme bucolique du sous-bois laurentien.

Menu gastronomique à la Table du Chef

La première mise en bouche donnait le ton à une mise en scène culinaire fort inspirée : une huître marinée au gin repose sur une roche repêchée le jour même dans un ruisseau de Tremblant par le chef et son pâtissier, Benjamin Oddo. Accompagné de gelée de concombre, aloe vera, herbes douces et d’un granité au vinaigre au fruit de la passion, le look rejoint le goût et donne envie de plonger dans un lac pour retrouver cette fraîcheur qui se déploie dans nos palais.

Second plat célébrant le meilleur des cueillettes estivales, un jardin d’asperges blanches côtoie de rondelettes fraises des bois goûteuses. Le traitement hétérogène des asperges révèle des textures croquantes et veloutées, et les petites crevettes de Matane fraîches marinées, vanillées et citronnées craquent en bouche. Une ode à l’été, féminine et légère.

Gonzalez envoie une suite spectaculaire, une véritable prouesse de superposition qui nous laisse cois. Deux langoustines poêlées au goût baratté encerclent un dôme d’œuf « à la neige » aérien. Sous la mousse immaculée repose un jaune d’œuf coulant qui se mêle aux giroles, amande et oxalis (de l’oseille sauvage). On collige les saveurs terre & mer sur une tartine. Un spectacle pour les papilles.

Heureusement que les portions sont dégustatives, puisque mon estomac tout ouïe attendait avec impatience ce 4^e plat coup de cœur. Un généreux pétoncle poêlé repose sur un lit de petits pois décomposés – en purée, frais, et en mousse. Des morilles aussi douces que le caramel reposent aux quatre coins de l’ardoise – on en redemanderait. Un dodu ravioli trône au centre et répand en bouche le jus de viande voluptueux à l’échalote frite qu’il contient.

La soirée se conclu tout en protéine avec une pièce de bœuf Angus vieilli  en duo avec un lard généreux et fondant, des pommes de terre grillées, et une sauce aigre-douce au cèpe et cerise, moutarde et violette. Un clin d’œil au menu régulier de grillades du Altitude qui laisse présager un repas en salle exécuté avec autant de précision.

C’est le pâtissier Benjamin Oddo (posté d’ordinaire au Casino du Lac-Laemy) qui clôt cette soirée forte en saveurs avec deux desserts exaltants. D’abord, sa fameuse crème « bulée » à la framboise, une sphère de sucre chatoyante si jolie que l’on peine à la percer, pour finalement savourer une fine gelée au champagne, espuma au yogourt et citronnelle. On nous achève avec une tarte au chocolat Madirofolo en contraste de température, caramel à la fève tonka, Panacotta à la cardamome noire de Chine, et un somptueux sorbet banane et meringue croquante.

En se prélassant le lendemain sur la terrasse de l’hôtel Fairmount qui nous accueillait pour l’occasion, on se rappelle aisément les saveurs valser de papille en papille, et les textures rouler en bouche. Toute bonne expérience de table devrait nous laisser juste assez de place pour une bouchée de plus, gourmandise qui demeure en suspens. La cuisine d’Éric Gonzalez est comme un chapitre que l’on ne veut pas terminer, ralentissant notre lecture jusqu’à en relire 12 fois la dernière phrase. On se retient de savourer le paragraphe finale jusqu’à notre prochaine visite au Casino de Tremblant!